Au pied du suc
TABLEAU MATINAL
On se sent bien quand la pensée colle avec le paysage.
J'aime ce ciel en gris avec les arbres blancs 1
Et la neige qui dort sur les toits du village,
Ce grand calme qui fait que stagnent les nuages
Et le cœur du pays qui bat d'un rythme lent.
Encor vierge de pas, notre rue fait semblant
De mener nulle part, avec ou sans bagage ;
Ce n'est que ma pensée qui bouge, qui voyage,
Qui cherche à s'enflammer dans un nouvel élan.
Je prendrais volontiers une petite toile
Pour immortaliser cette aube sans étoile
Mais je ne me sens plus capable de saisir
Cette atmosphère qui remplit pourtant mon âme,
Perdue dans la beauté, d'un intense plaisir...
Mais c'est avec des mots qu'il faut que je le clame.
1 Vers donné par Jeanne Champel Grenier
UN BEAU PROJET
Ne dépassons pas les limites du temps imparti, sans quoi...
Et si nous essayions de retrouver nos marques :
Repartir du bon pied, puis regagner la mer ;
Prendre les avirons pour quitter cet enfer
Et tâcher, cette fois, de mieux mener nos barques.
Dans ce monde de fous, on nous bloque, on nous parque :
Le breuvage devient de plus en plus amer ;
Notre tête, sans force, est pire qu'un désert,
On est à la merci d'un quelconque monarque
Qui prend sur nous le pas, nous oblige à céder.
Notre esprit n'en peut plus de se faire brider :
Plus d'imagination, de création possible !
La société qui joue n'a pas un autre but
Que de nous faire tous ballotter par son crible
Et les grains trop petits sont jetés au rebut.
QUE SOUHAITER D'AUTRE ?
Le temps embellit le passé
Elle dort la petite église
Où nous allions faire nos vœux,
Où nous rêvions à notre guise
En nous faisant de doux aveux.
Notre bonheur toujours de mise
Nous l'avions construit tous les deux ;
Sur lui le temps n'a pas de prise,
Notre ciel est toujours radieux.
Puissent tous les hommes sur terre
Trouver le leur et le parfaire
Sans défaillir jour après jour ;
Que 2019 vous y aide !
Écoutez les chants de l'aède
Lorsqu'ils vous racontent l'amour.
TABLEAU VIVANT
Les rêves de tes cils font courir les nuages !
Je les suis dans le ciel pour trouver leur couleur
Plus claire, plus foncée, commencer un voyage
Qui mène quelque part où niche le bonheur.
Sur eux je pourrais faire un très, très long métrage,
Tant je me suis plongé dans leur lac où les fleurs
De lotus grandissaient se donnant en partage
A mes regards fiévreux qui captaient leur douceur.
J'en ai fait des saisons d'amour sans que la guerre
Se profile entre nous, déchaîne sa misère,
Ce n'est pas maintenant que je vais tout gâcher ;
Nos âmes apaisées peuvent vivre tranquilles
Sont mortes les quelques raisons de nous fâcher :
Les colombes chez nous ont élu domicile.
LA DEBACLE
Je revois des soldats soulevant la barrière,
Entrant dans le pays comme s'il était leur ;
C'était au cinéma mais nous avions grand peur
Car nous savions que ça se passait aux frontières.
Nos troupes refluaient, je pensais à mon père,
Mobilisé là -bas mais présent dans mon coeur ;
En silence maman, visage tout en pleurs,
Devait dans sa pensée réciter des prières.
Qu'allait -il advenir de nos amis de nous ?
On disait qu'on allait finir sur les genoux ;
Des familles partout en un jour exilées !
Il a fallu tenir dans notre coin de France !
Pour voir éclore un jour la fleur de l'espérance. ..
Oh ! Nous les avons bues ces larmes si salées ! 1
1 donné par Lyse Bonneville
REVE POSSIBLE ?
Nous avons eu vingt ans nous les aurons encore
Quand le temps se sera brusquement retourné
Pour partir à l'envers avant de nous donner ,
Corps et âme, à jamais à la nouvelle aurore.
Nous aurons absorbé l'aube par tous les pores,
Les feuilles d'olivier nous auront couronnés
Et nous saurons enfin pour quoi nous sommes nés,
Chacun de nous dira tout ce que l'autre ignore,
Pour qu'à deux nous formions cet être généreux
Que nous avons conçu à l'image des preux
Car le monde n'est pas qu'un objet sans réponse ;
Tout sera dévoilé, la conscience entendra
Tout ce qui, pour l'instant dans les ombres s'enfonce
Et fait que nous sommes tous dans de sales draps.
EVASION SOUHAITABLE
" Il faut tenter de vivre " 1 avec ou sans le vent,
La poésie en poupe et les mots à l'avant
Pour fuir cet âge obscur qui nous lasse et nous casse,
Qui laisse beaucoup d'entre nous a la ramasse.
Du gai savoir soyons les chevaliers servants,
À chaque instant prouvons que nous sommes vivants ;
A nos rêves secrets donnons un peu d'espace
Sans attendre jamais que notre temps s'efface.
Nous verrons refleurir l'arbre tout en beauté
De l'entente des cœurs et de la liberté
Qui saura réunir toutes nos différences ;
C'était sont elles l'engrais qui fortifié les fruits
Et qui peut nous donner une nouvelle chance
De mettre sur les rails un monde mieux construit.
1 Vers de P. Valéry dans Le Cimetière marin
UTILISATION ABJECTE
Aucun savoir ne peut se passer de morale
L'ordinateur est un incomparable outil
Qui permet de surfer sur toute connaissance ;
Il constitue une seconde Renaissance,
Utile pour les grands comme pour les petits.
Il accroît chaque jour un peu mon appétit
Pour découvrir ce que me propose la science :
Apprendre est désormais une réjouissance
Et devenir meilleur peut être garanti.
Mais hélas ! le meilleur avoisine le pire
Des voyous dévoyeurs exercent leur empire
Sur cet universel et beau puits de savoir ;
Ils lancent de l'intox et de fausses nouvelles
Qui ne peuvent que faire naître des querelles :
Qu'attendent pour agir les hommes de pouvoir ?
SERENITE RETROUVEE
Il est des moments de grâce où l'on se retrouve enfin.
« Ce soir l'air est muet, les toits sont en veilleuse »1
Sous la neige qui maintenant tombe sans bruit ;
Chaque flocon se pose en douceur et la nuit
Semble ne pas venir, occupe l'heure creuse.
La paix descend en moi, je me sens l'âme heureuse
En accord avec la nature ; en elle luit
L'espérance qui fait que la force s'ensuit
De retrouver raison d'aimer sous ma liseuse.
Le livre que je suis en train de découvrir .
Le silence est propice et vient me soutenir ;
Les mots, curieusement passent dans ma pensée
Sans déranger ce qui se passe à l'extérieur :
La plume ne dit rien, pour l'instant délaissée ,
Et le récit essaie de m'emporter ailleurs.
1 Vers proposé par Jeanne Champel Grenier